« Je ne me sens plus motivé, mais je ne saurais pas dire pourquoi. » Cette phrase, je l’entends régulièrement dans les ateliers que j’anime. Elle vient d’un cadre, d’un agent public, d’un jeune salarié ou d’un dirigeant. Elle dit quelque chose d’essentiel : les leviers de motivation au travail ne se réduisent pas à la rémunération ou aux perspectives de carrière. Pour comprendre ce qui fait tenir – ou décrocher – un collaborateur aujourd’hui, il est utile de revisiter un grand classique : la pyramide de Maslow.

La pyramide de Maslow : Un outil connu… mais souvent mal compris

La pyramide de Maslow en bref

Proposée dans les années 1940 par le psychologue Abraham Maslow, cette pyramide hiérarchise les besoins humains en cinq niveaux :

  1. Besoins physiologiques (se nourrir, se reposer)
  2. Besoins de sécurité (stabilité, cadre de travail)
  3. Besoins sociaux (appartenance, reconnaissance)
  4. Besoins d’estime (valeur personnelle, respect)
  5. Besoins d’accomplissement (réalisation de soi, sens)

L’idée de base est simple : un besoin supérieur n’émerge pleinement que si les besoins précédents sont relativement satisfaits. Mais transposée au monde de l’entreprise, cette vision mérite d’être adaptée.

Une lecture trop rigide pour le travail ?

En réalité, les besoins au travail sont rarement linéaires. Un salarié peut rechercher du sens dans sa mission (accomplissement), tout en se sentant en insécurité financière (niveau 2). Dans les formations ACANT, je propose une lecture plus dynamique : les besoins coexistent, s’entrecroisent et varient selon les contextes de vie et les enjeux professionnels.

Repenser la motivation avec Maslow

Niveau 1 et 2 : Ne pas négliger les fondations

Dans certaines entreprises, on me dit : « On veut motiver les équipes avec plus d’autonomie et de reconnaissance. » Très bien. Mais dans les faits, la charge de travail est intenable, les horaires imprévisibles et les salaires stagnants. Or, tant que les besoins fondamentaux (repos, sécurité, clarté) ne sont pas respectés, il est illusoire de viser l’épanouissement.

Niveau 3 : L’importance de l’appartenance

Le sentiment d’appartenance est aujourd’hui un critère majeur d’engagement. Il repose sur des éléments concrets : qualité du lien avec le manager, droit à la parole, reconnaissance de l’individu. Quand une équipe fonctionne bien, c’est souvent parce que ces besoins sont nourris au quotidien, dans les petites interactions comme dans les rituels collectifs.

Niveau 4 et 5 : Estime et accomplissement, moteurs de fidélisation

Ce sont ces niveaux qui permettent à une entreprise de retenir ses talents. Estime : ai-je le sentiment d’être reconnu pour ce que je fais ? Accomplissement : ai-je le sentiment de contribuer à quelque chose qui a du sens ? Ce sont des questions que je pose souvent en formation, et les réponses varient fortement selon les pratiques managériales.

Le rôle des RH : cartographier les besoins selon la grille de Maslow pour mieux y répondre

Un outil pour piloter la motivation

Revisiter la pyramide de Maslow, ce n’est pas faire de la psychologie théorique. C’est proposer une lecture pragmatique de la motivation. Pour un professionnel RH, elle peut devenir un outil d’analyse : quelles strates de besoins sont fragiles dans mon organisation ? Où se situent les tensions ? Quels leviers d’action prioriser ?

Exemple d’application en formation

Dans un programme récemment mené avec ACANT, nous avons utilisé la pyramide pour repenser les parcours d’intégration. Résultat : au lieu de surcharger les nouveaux arrivants d’informations techniques (niveau 5), nous avons d’abord sécurisé les bases (accueil, clarté des missions, accès aux outils), favorisé les liens (parrainage, rituels d’équipe), puis introduit progressivement les enjeux de développement. L’effet a été immédiat sur la satisfaction et l’implication.

Conclusion : Vers un management plus humaniste

Revisiter Maslow pour le monde du travail, c’est une façon de remettre l’humain au centre, non pas en théorie, mais en action. C’est poser une question simple : à quoi ressemblent les besoins fondamentaux aujourd’hui dans nos entreprises ? Et surtout : que faisons-nous concrètement pour y répondre ?

Parce qu’un collaborateur motivé, ce n’est pas quelqu’un qu’on « booste ». C’est quelqu’un dont les besoins sont écoutés, respectés, nourris.